R.S : Bonjour Roland...

R.T : Bonjour Reynald !

R.S : Comment avez-vous commencé votre carrière artistique ?

R.T : A Montpellier, au Conservatoire National de Région, dont je suis sorti avec un premier prix de comédie et un premier prix de tragédie, ouais ! Ensuite au Théâtre Quotidien de Montpellier dirigé par Michel Touraille. Et puis j'ai eu l'envie de "monter à Paris".

R.S : La scène a une grande importance pour vous et, en plus du théâtre, vous êtes également clown. Est-ce que ce sont deux univers différents ou pas si éloignés finalement ?

R.T : Oui et non ! Un clown est un personnage qui joue à jouer. S'il n'est pas totalement sincère dans ses jeux, dans ses "pérégrinations", cela se voit comme le nez au milieu de la figure ! Un acteur doit être sincère également mais je dois dire qu'un acteur médiocre peut souvent "passer" grâce au texte, tandis que pour un clown la sanction est immédiate et sans appel. D'ailleurs, les spectateurs traumatisés par de mauvais clowns en parlent avec beaucoup de conviction ! En même temps l'acteur doit atteindre cette authenticité. J'ai dirigé des ateliers sur le clown, notamment au studio Pygmalion où j'ai été coach durant 4 ans, et ce travail est riche d'enseignements pour les acteurs. Il les amène à s'oublier, à ne pas faire d'autocensure et les aide à "être". Et puis il permet aux acteurs d'accéder à leur imaginaire, qu'ils considèrent à tort trop souvent comme pauvre.

R.S : Vous êtes également responsable d'une compagnie. Même s'il y a un côté administratif, je pense que le côté artistique compte beaucoup aussi ?

R.T : Avec ma camarade Isabelle Ganz, nous animons la Compagnie Calvero. Nous étions en février en Israël pour une tournée de mon spectacle "Chapo dans le métro". Nous avons joué pour des publics différents qui cohabitent difficilement et c'est une expérience qui ne s'oublie pas. Isabelle a mis en scène récemment un spectacle intitulé "Cirque et poésie" et la compagnie a fait travailler des enfants qui ont fait un spectacle. C'est beaucoup beaucoup de travail !

R.S : A partir de quel moment le doublage a-t-il fait partie de votre vie ?

R.T : J'ai fait un stage AFDAS, en 1985 je crois, animé par Jean Pierre Dorat. Mais, pris par le théâtre, je n'ai démarché les sociétés de doublage que 3 ans après. C'était un très bon stage.

R.S : Se glisser dans la peau d'un autre comédien, c'est un rôle comme un autre ou y voyez-vous une petite subtilité que les autres branches de la profession n'ont pas ?

R.T : C'est se mettre totalement au service d'un autre acteur. On fait abstraction de soi pour se glisser justement dans l'autre. C'est un dédoublement qui demande de l'abnégation et il faut avoir le désir de s'effacer au profit de quelqu'un d'autre. Je me demande si nous mesurons bien cela ! C'est un sacrifice en quelque sorte.

R.S : La direction artistique est-elle pour vous une manière différente d'exprimer votre amour pour la comédie ?

R.T : Donner à un acteur les clés pour trouver une intention, une émotion, c'est jubilatoire ! Mais le travail industriel du doublage des séries procure maintenant trop rarement ces sensations... Je souhaite maintenant diriger des films ou des séries dans des conditions convenables : texte de qualité et vérifié, bonne détection, etc.

R.S : En regardant votre CV, on constate que vous êtes un homme actif et que le simple fait de jouer ne vous suffit pas ! Est-ce la passion qui vous donne une telle énergie ?

R.T : La passion de la vie. Je suis athée, je ne crois pas au paradis, donc je pense que notre vie est comme une vigne qu'il faut travailler, aimer. Parfois il faut tailler, changer de cépage... C'est pourquoi, après de nombreuses années passées à diriger, j'ai décidé de lever le pied sur la direction et de me concentrer sur mon travail d'acteur : doublage, pub, télé, cinéma. Mais j'aimerais beaucoup travailler plus comme acteur dans le doublage car, en fait, on me connaît peu, à part pour "Star Wars" ou pour Billy Crystal !

R.S : En dehors de toutes vos activités liées au métier, quelles sont vos autres passions ?

R.T : Mes enfants, la poésie et une femme.

R.S : Merci beaucoup Roland.

R.T : Merci beaucoup Reynald de mettre votre passion au service des acteurs.

Interview de mai 2006