R.S : Bonjour Benjamin.

B.C : Bonjour Reynald.

R.S : Tu te présentes sur ton site comme "Comédien spécialisé dans la voix enregistrée depuis quelques années". Pourquoi avoir choisi cette spécialisation ?

B.C : Je me suis d’abord destiné à la publicité après des études de Com à Sup de Pub. J’avais besoin d’un métier créatif avec un sentiment de liberté au boulot éloigné de la vie en entreprise. La création en pub me semblait être un bon terrain d’expression artistique au début. J’ai appris à écrire des spots de pub et à les jouer à nos clients pour les présenter. C’est alors qu’on m’a dit que je m’amuserais plus à être comédien voix off que concepteur rédacteur... Il ne fallait pas me le dire deux fois, je m’y suis jeté corps et âme. Il faut dire qu’à l’école déjà j’étais le rigolo et j’imitais tout le monde autour de moi (jamais Jacques Chirac je vous rassure !).

R.S : Qu'est-ce que cet atelier "La Voix Actée" avec lequel tu as travaillé ?

B.C : Quand j’ai décidé de tout plaquer pour la voix off en 2009, j’ai repris les choses dans l’ordre et j’ai travaillé ma voix par le chant et les techniques de respiration avec la coach vocale Yael Benzaquen pendant deux ans. Elle m’a proposé de jouer des sketches car elle a vu le comédien en moi. Elle m’a motivé à vivre l’expérience de la scène et m’a orienté vers le cours de théâtre "La Voix Actée" de Stephan Munier Roche (auteur, metteur en scène et interprète du Rimbaud Verlaine au théâtre du Gymnase - 2019). Une formation 50% chant, 50% acting. J’y ai passé trois années, 7 heures par semaine de travail et d’intenses satisfactions. Stephan est encore mon coach de chant même si je le vois moins régulièrement.

R.S : Et qu'est-ce que cet atelier continu "Keys Acting Studio" ?

B.C : C’est le prolongement de tout ça. Toujours grâce au bouche-à-oreille et un entourage de passionnés j’ai connu ce studio d’acting, "Keys". J’y travaille la création de personnages, mes castings, et nous sommes une ruche où l’on profite des ressources créatives de chacun au service de tous, acteurs, auteurs réalisateurs, monteurs, pour créer nos projets ensemble. Ce qui nous distingue c’est le coaching de Sei Shiomi qui a trente ans d’analyse du jeu d’acteur à l’international et qui a développé des exercices bien à lui pour apporter toujours plus de vérité à nos personnages. On ne « joue » plus ;). Associé à Tony Tich (Co fondateur des Yamakasi) on travaille sur notre corps, la proprioception, l’agilité etc. Bref c’est le bonheur. :-)

R.S : Le doublage arrive relativement tard dans ton parcours, si je ne me trompe pas. Tu n'y avais pas pensé avant ?

B.C : Si, c’est même la première chose que j’ai voulu faire dans la vie. J’étais téléphage et j’ai avalé les séries et les films américains dans années 80. J’étais un peu Looping de l’Agence Tous Risques à l’école mais pas complètement fou ! La voix m’a toujours fasciné et j’ai vu dans les yeux de mes potes le pouvoir que cela donne de savoir moduler sa voix. Malheureusement j’ai eu une scolarité dans une école très stricte et j’étais mauvais en français. J’ai cru que le théâtre n’était donc pas pour moi (quelle erreur !). C’est pourquoi des années plus tard et connaissant l’exigence du métier d’acteur j’ai entrepris une formation complète de théâtre avant de me présenter dans le milieu du doublage.

R.S : Quel a été ton sentiment lorsque tu as dû te confronter pour la première fois à la bande rythmo ?

B.C : Je me suis senti bien tout de suite. Grâce à mon expérience dans la voix off j’ai pu me concentrer sur l’essentiel, le jeu du comédien à doubler. J’ai aussi de l’oreille et ça aide pour mémoriser les ruptures. Je suis quelqu’un de plutôt tonique et réactif, sur l’aspect technique j’étais prêt.

R.S : Cette discipline de micro est plus contraignante que celles dont tu as l'habitude. Ce qui est en somme un manque de liberté n'est-il pas quelque chose de frustrant ?

B.C : Suivre les rails d’un acteur à doubler ne m’emprisonne pas. Je parlais tout à l’heure de mes imitations des gens autour de moi. C’est une capacité à capter une énergie, un rythme, repérer ses tics, sa façon de bouger. C’est ma façon de rentrer dans la peau d’un autre par l’observation et je m’en sers naturellement dans le doublage.

R.S : De la même façon, est-ce que vivre dans l'ombre des studios n'est pas frustrant pour un comédien ?

B.C : Pas du tout. Je te dirais que grâce au doublage je retrouve le plaisir du travail collectif. Le comédien voix off est seul, vraiment seul. Là je rencontre tellement de gens intéressants dans un métier ô combien vivant que je me sens plus dans un salon où l’on partage des performances artistiques que dans un endroit mal éclairé. Pour ce qui est de la lumière de la sacrosainte célébrité je n’ai jamais couru après. Si elle doit arriver ce sera la conséquence d’un travail vital pour moi : jouer la comédie.

R.S : Quels sont tes loisirs ?

B.C : J’ai un passé de DJ électro/techno. Entre 2001 et 2007 j’ai joué dans des clubs tels que Batofar, Glaz’Art, Flèche d’Or, Rex Club, Trilogy à Dubai... Si je n’ai aujourd’hui plus de machines pour composer car ça prend trop de temps, je recherche toujours des morceaux à mixer de temps en temps. J’en fais profiter quelques intimes mais encore cet été on m’a proposé de jouer prochainement à un festival à Beyrouth. Preuve que j’ai encore quelques restes. :-)

R.S : Merci beaucoup Benjamin.

B.C : Merci beaucoup à toi Reynald !

Interview d'octobre 2019