Maurice Decoster
Genres :
Voix Jeune adulte homme, Voix Adulte homme
Tonalité :
Medium, Grave
Langues parlées :
Anglais avec accent non déterminé, Espagnol
Doublage
télévision, VOD & DVD
2004
télévision, VOD & DVD
2011
Sous l'emprise du pasteur : l'histoire vraie de Mary Winkler (Steve Farese Sr.)
télévision, VOD & DVD
2020
Eurovision Song Contest : The Story of Fire Saga (Lars Erickssong - Voix parlée)
Télé-réalité d'aventure
Running Wild with Bear Grylls
Voix
Documentaire
A l'ombre des grands Châteaux (Narrateur, 10 ép. Arte)
Documentaire
Gabriel Garcia Marquez (Narrateur Arte)
Documentaire
Les Andes Nature extrême (Narrateur, 3 ép. Arte)
Documentaire
Les Châteaux du Moyen âge (Narrateur, 2 ép. Arte)
Documentaire
Notre Europe Quelle Histoire (Narrateur, 10 ép. Arte)
Interview
R.S : Bonjour Maurice...
M.D : Bonjour Reynald.
R.S : Comment as-tu commencé ta carrière de comédien ?
M.D : Après un deug de langues étrangères appliquées, je suis allé, en plein mois de janvier, assister en auditeur libre aux cours d'art dramatique de Madame Muriel Chaney au Conservatoire National de Nice (sur les conseils d'un copain élève), projetant de passer le concours d'entrée à la rentrée suivante. Très vite elle m'a proposé de donner la réplique à une élève lors de l'examen de barrage de février présidé par Monsieur Julien Bertheau, et destiné à décider quels élèves seraient autorisés à concourir en fin d'année. J'ai donc travaillé sous sa direction une scène de "La ménagerie de verre", de Tennessee Williams, et donné la fameuse réplique à l'examen. Lors du verdict, ma camarade fut autorisée à concourir en fin d'année, et j'eus le grand étonnement d'entendre citer mon nom par le jury, assorti des mots "Exceptionnellement accepté élève immédiatement, et autorisé à concourir". J'ai donc intégré séance tenante le cursus de formation de comédien du Conservatoire de Nice, jusqu'à mon départ pour "la capitale" trois ans plus tard.
R.S : Que t'a apporté ta formation ?
M.D : Ma formation m'a apporté confiance, rigueur, concentration, contrôle de ma voix et de mon corps, écoute et respect de l'autre, intelligence du texte, et surtout la certitude d'aimer cette profession, et d'y être à ma place.
R.S : Comment as-tu commencé le doublage ?
M.D : Après un rôle dans "L'imprésario de Smyrne", un spectacle du Théâtre du Campagnol, décroché à peine quelques mois après mon débarquement à la Linda De Suza. N'ayant pas de rôle dans la création suivante, je me suis tourné vers le porte-à-porte à la SFP pour rencontrer des réalisateurs. Et j'ai fait le siège des agents et des casting directors, tout en gagnant en parallèle de quoi survivre en faisant des petits boulots de serveur à mi-temps, sans malheureusement connaître personne dont me recommander, ou susceptible de me "pistonner". Les réponses que je recevais tournaient grosso modo toutes autour de "quand vous aurez tourné dans quelque chose, ou quand vous jouerez quelque part, revenez me voir" ou "la patience est la vertu du comédien". Aussi je décidai de donner bénévolement de mon temps au Syndicat des Artistes Interprètes pour coller des enveloppes lors des envois en nombre, pour aller visiter et aider certains comédiens malades et diminués, etc. Un jour quelqu'un m'a dit de venir sur un plateau de doublage, pour assister à un enregistrement. A cette époque il n'était pas aussi fréquent ni aussi facile qu'aujourd'hui de pouvoir assister. J'y suis donc allé, me suis fait tout petit, et j'ai écouté, regardé, observé. J'étais très impressionné par la maestria de certains "cadors" comme Philippe Dumat, Marc Cassot, Jean-Claude Michel, Paule Emmanuelle, Evelyn Séléna, Patrick Poivey, Richard Darbois, et bien d'autres... J'eus l'adresse des différents studios de doublage en activité et, fort de ma qualité de motard, allai assister pendant plus d'un an aux enregistrements un peu partout, écoutant, regardant, apprenant en silence à déjouer les pièges techniques, à comprendre les finesses de cette spécificité du métier de comédien, m'éclipsant avant d'être pesant, et me faisant toujours tout petit. Pour ne pas me brûler les ailes j'ai longtemps décliné poliment les gentilles invitations à faire un "essai de voix", ne me sentant pas encore assez prêt. Et puis un jour je me suis avancé à la barre, le sang battant dans toutes mes veines au point d'en entendre le bruit dans mes oreilles. Ça s'est bien passé. Je ne suis pas mort, contrairement à ce que je craignais. J'ai fait d'autres essais un peu partout, pendant quelques mois. Chaque fois j'en sortais vivant. Assez vite on m'a appelé sur des ambiances, des petits rôles, des moyens rôles, des petit-grands rôles, puis des rôles principaux...
R.S : Qu'as-tu ressenti la première fois que tu as entendu un comédien étranger parler avec ta voix ?
M.D : Ca m'a fait tout bizarre. J'ai trouvé que ça ne "collait pas". Entendre ma voix déjà, que je ne connaissais pas, au tout début, fut assez troublant, à la limite du désagréable. Je la trouvais moche. Moins bien que celle des autres. Puis je m'y suis habitué.
R.S : Tu es la "voix habituelle" de Ben Stiller, Rob Estes, Joe Lando... Comment se passe chaque retrouvaille ?
M.D : C'est un grand bonheur. Chaque fois. J'ai toujours un peu peur avant, lorsque je suis prévenu que je vais à nouveau me retrouver au service du jeu de l'un ou de l'autre de ces comédiens. Peur qu'ils aient développé un jeu que je ne parviendrais pas à reproduire. Et puis ils me happent dans leur image, et je ne me retrouve totalement "en moi-même" que pendant les pauses, et à la fin des journées d'enregistrement. Ça décoiffe ! D'ailleurs je ne me coiffe plus, comme ça personne ne remarque rien.
R.S : On sait que sur les séries le temps est de plus en plus réduit. Vois-tu cela comme une contrainte ou est-ce une motivation supplémentaire ?
M.D : Ce sont les deux à la fois. Il y a la frustration de ne pas avoir le temps de coller encore plus à l'original, de mieux travailler la ressemblance, peaufiner les intentions, le sous-texte, etc. Et il y a aussi l'obligation impérative de piger, intégrer, restituer au plus juste toutes les données en un temps record, ce qui est assez excitant, pour peu qu'on y parvienne. Malheureusement, parfois, on sait qu'on est quelque peu passé à côté de tel ou tel détail qui compte pour la crédibilité du doublage. On aurait envie de refaire, mais on nous dit que le temps ne le permet pas. Alors on passe à la scène, "la boucle", suivante, et on essaie de ne pas se laisser entamer par la morosité engendrée par le sentiment de "aurait pu mieux faire" qui se mêle à la salive. On se concentre encore plus, on écoute, on regarde encore plus, et on jure de ne plus s'y faire prendre...
R.S : Si tu devais définir en quelques mots le doublage, que dirais-tu ?
M.D : C'est une discipline complexe qui demande d'avoir le total contrôle de soi-même afin de s'oublier totalement au profit de la personne qui est à l'image. Ne pas jouer, articuler, respirer, comme on aurait joué, articulé, respiré, mais comme ELLE l'a fait. Je pense que l'ego, qui est pourtant présent en chacun de nous (surtout lorsqu'on a choisi un métier public), est le principal ennemi du comédien qui fait du doublage, parce qu'il le guide insidieusement sur la route du "je fais du moi-même"... C'est sans doute pour nous aider à lutter contre cet ego que bon nombre de génériques de fin (notamment dans les DVD) ne font même pas mention de notre existence.
R.S : En dehors de ton métier, quelles sont tes passions ?
M.D : Mes véritables passions sont rares. On ne peut pas être partout ! J'aime beaucoup de choses en revanche. J'aime écrire. J'adore la musique, je joue des percussions (pas dans ma salle de bains mais presque), j'aime chanter (pas là non-plus), j'aime faire des parfums, j'adore la moto, la conduite automobile (sauf dans les embouteillages), la voile, la mer, les dauphins, les baleines, les chiens, les koalas, et je me passionne pour les bonnes surprises, si rares elles aussi...
R.S : Merci beaucoup Maurice.
M.D : De rien ! Merci à toi aussi Reynald !
Interview de mai 2009
M.D : Bonjour Reynald.
R.S : Comment as-tu commencé ta carrière de comédien ?
M.D : Après un deug de langues étrangères appliquées, je suis allé, en plein mois de janvier, assister en auditeur libre aux cours d'art dramatique de Madame Muriel Chaney au Conservatoire National de Nice (sur les conseils d'un copain élève), projetant de passer le concours d'entrée à la rentrée suivante. Très vite elle m'a proposé de donner la réplique à une élève lors de l'examen de barrage de février présidé par Monsieur Julien Bertheau, et destiné à décider quels élèves seraient autorisés à concourir en fin d'année. J'ai donc travaillé sous sa direction une scène de "La ménagerie de verre", de Tennessee Williams, et donné la fameuse réplique à l'examen. Lors du verdict, ma camarade fut autorisée à concourir en fin d'année, et j'eus le grand étonnement d'entendre citer mon nom par le jury, assorti des mots "Exceptionnellement accepté élève immédiatement, et autorisé à concourir". J'ai donc intégré séance tenante le cursus de formation de comédien du Conservatoire de Nice, jusqu'à mon départ pour "la capitale" trois ans plus tard.
R.S : Que t'a apporté ta formation ?
M.D : Ma formation m'a apporté confiance, rigueur, concentration, contrôle de ma voix et de mon corps, écoute et respect de l'autre, intelligence du texte, et surtout la certitude d'aimer cette profession, et d'y être à ma place.
R.S : Comment as-tu commencé le doublage ?
M.D : Après un rôle dans "L'imprésario de Smyrne", un spectacle du Théâtre du Campagnol, décroché à peine quelques mois après mon débarquement à la Linda De Suza. N'ayant pas de rôle dans la création suivante, je me suis tourné vers le porte-à-porte à la SFP pour rencontrer des réalisateurs. Et j'ai fait le siège des agents et des casting directors, tout en gagnant en parallèle de quoi survivre en faisant des petits boulots de serveur à mi-temps, sans malheureusement connaître personne dont me recommander, ou susceptible de me "pistonner". Les réponses que je recevais tournaient grosso modo toutes autour de "quand vous aurez tourné dans quelque chose, ou quand vous jouerez quelque part, revenez me voir" ou "la patience est la vertu du comédien". Aussi je décidai de donner bénévolement de mon temps au Syndicat des Artistes Interprètes pour coller des enveloppes lors des envois en nombre, pour aller visiter et aider certains comédiens malades et diminués, etc. Un jour quelqu'un m'a dit de venir sur un plateau de doublage, pour assister à un enregistrement. A cette époque il n'était pas aussi fréquent ni aussi facile qu'aujourd'hui de pouvoir assister. J'y suis donc allé, me suis fait tout petit, et j'ai écouté, regardé, observé. J'étais très impressionné par la maestria de certains "cadors" comme Philippe Dumat, Marc Cassot, Jean-Claude Michel, Paule Emmanuelle, Evelyn Séléna, Patrick Poivey, Richard Darbois, et bien d'autres... J'eus l'adresse des différents studios de doublage en activité et, fort de ma qualité de motard, allai assister pendant plus d'un an aux enregistrements un peu partout, écoutant, regardant, apprenant en silence à déjouer les pièges techniques, à comprendre les finesses de cette spécificité du métier de comédien, m'éclipsant avant d'être pesant, et me faisant toujours tout petit. Pour ne pas me brûler les ailes j'ai longtemps décliné poliment les gentilles invitations à faire un "essai de voix", ne me sentant pas encore assez prêt. Et puis un jour je me suis avancé à la barre, le sang battant dans toutes mes veines au point d'en entendre le bruit dans mes oreilles. Ça s'est bien passé. Je ne suis pas mort, contrairement à ce que je craignais. J'ai fait d'autres essais un peu partout, pendant quelques mois. Chaque fois j'en sortais vivant. Assez vite on m'a appelé sur des ambiances, des petits rôles, des moyens rôles, des petit-grands rôles, puis des rôles principaux...
R.S : Qu'as-tu ressenti la première fois que tu as entendu un comédien étranger parler avec ta voix ?
M.D : Ca m'a fait tout bizarre. J'ai trouvé que ça ne "collait pas". Entendre ma voix déjà, que je ne connaissais pas, au tout début, fut assez troublant, à la limite du désagréable. Je la trouvais moche. Moins bien que celle des autres. Puis je m'y suis habitué.
R.S : Tu es la "voix habituelle" de Ben Stiller, Rob Estes, Joe Lando... Comment se passe chaque retrouvaille ?
M.D : C'est un grand bonheur. Chaque fois. J'ai toujours un peu peur avant, lorsque je suis prévenu que je vais à nouveau me retrouver au service du jeu de l'un ou de l'autre de ces comédiens. Peur qu'ils aient développé un jeu que je ne parviendrais pas à reproduire. Et puis ils me happent dans leur image, et je ne me retrouve totalement "en moi-même" que pendant les pauses, et à la fin des journées d'enregistrement. Ça décoiffe ! D'ailleurs je ne me coiffe plus, comme ça personne ne remarque rien.
R.S : On sait que sur les séries le temps est de plus en plus réduit. Vois-tu cela comme une contrainte ou est-ce une motivation supplémentaire ?
M.D : Ce sont les deux à la fois. Il y a la frustration de ne pas avoir le temps de coller encore plus à l'original, de mieux travailler la ressemblance, peaufiner les intentions, le sous-texte, etc. Et il y a aussi l'obligation impérative de piger, intégrer, restituer au plus juste toutes les données en un temps record, ce qui est assez excitant, pour peu qu'on y parvienne. Malheureusement, parfois, on sait qu'on est quelque peu passé à côté de tel ou tel détail qui compte pour la crédibilité du doublage. On aurait envie de refaire, mais on nous dit que le temps ne le permet pas. Alors on passe à la scène, "la boucle", suivante, et on essaie de ne pas se laisser entamer par la morosité engendrée par le sentiment de "aurait pu mieux faire" qui se mêle à la salive. On se concentre encore plus, on écoute, on regarde encore plus, et on jure de ne plus s'y faire prendre...
R.S : Si tu devais définir en quelques mots le doublage, que dirais-tu ?
M.D : C'est une discipline complexe qui demande d'avoir le total contrôle de soi-même afin de s'oublier totalement au profit de la personne qui est à l'image. Ne pas jouer, articuler, respirer, comme on aurait joué, articulé, respiré, mais comme ELLE l'a fait. Je pense que l'ego, qui est pourtant présent en chacun de nous (surtout lorsqu'on a choisi un métier public), est le principal ennemi du comédien qui fait du doublage, parce qu'il le guide insidieusement sur la route du "je fais du moi-même"... C'est sans doute pour nous aider à lutter contre cet ego que bon nombre de génériques de fin (notamment dans les DVD) ne font même pas mention de notre existence.
R.S : En dehors de ton métier, quelles sont tes passions ?
M.D : Mes véritables passions sont rares. On ne peut pas être partout ! J'aime beaucoup de choses en revanche. J'aime écrire. J'adore la musique, je joue des percussions (pas dans ma salle de bains mais presque), j'aime chanter (pas là non-plus), j'aime faire des parfums, j'adore la moto, la conduite automobile (sauf dans les embouteillages), la voile, la mer, les dauphins, les baleines, les chiens, les koalas, et je me passionne pour les bonnes surprises, si rares elles aussi...
R.S : Merci beaucoup Maurice.
M.D : De rien ! Merci à toi aussi Reynald !
Interview de mai 2009